Le fils du muet n’a pas la parole



Lors de la représentation, les trois artistes sont chacun aux commandes de leurs modes artistiques respectifs. Ils travaillent en direct à mêler leurs intuitions et élaborations. Une expérience unique en temps réel et hors-temps, un travail poétique aigu, un espace d’expérience sur la diversité et l’unité organiques.


Michel Gendarme crée, à l’aide d’un dispositif électronique simple (ordinateur), une approche particulière du texte. Une liste organisée de 4500 mots dans laquelle le poète pioche selon une logique inventée, proposant à l’auditeur de construire lui-même le sens du texte par association.


Marguerite Papazoglou met en forme l’espace par la présence d’un corps.


Jean-Sébastien Mariage (guitare électrique, boucleur) structure cette poésie interactive par une création sonore.


Présentation video d’une séance de travail au Logelloù en septembre 2023 :



Michel et Jean-Sébastien travaillent ensemble depuis de nombreuses années sur différents projets. Le dernier en date est "Les enfants de moins de douze ans volent", dont on peut trouver un extrait sur le site Inversus Doxa.

Pour ce projet ils ont demandé à Marguerite de les rejoindre.

Après une première résidence de création en juillet 2022 au Logelloù (Côtes d’Armor), une deuxième session de travail est prévue dans le même lieu. Ce sera l’occasion d’approfondir ce qui a déjà été trouvé et surtout d’y incorporer la danse.


La Voix La Musique La Danse

Assembler dans un même espace, dont les normes sont définies par les impératifs de la rencontre, plusieurs potentialités créatrices – un poète, une danseuse, un musicien - afin de proposer en un temps relativement défini, aux spectateur.trice.s/auditeur.trice.s, des multiples possibilités d’imprégnation poétique.

Agencer dans ce temps et cet espace les inter-relations créées entre la voix, la musique, la danse, par une recherche liée au conflit permanent entre cohérence et incohérence. Cette triangulation installée, provoquée, crée, par les compositions en temps réel, de multiples métonymies et métaphores perçues par les spectateur.trices/auditeur.trices. Elle provoque la naissance, la mort, l’enfouissement, le jaillissement poétiques. Cette intention se balise sur des mises en accord relatives des artistes qui peuvent être épuisées ou naître au cours de l’expérience.


La musique

La musique instaure un lien entre les mots et le corps par des étendues mouvantes de sons qui évoluent, se transforment, glissent, de façon rapides ou très lentes. Des évènements viennent ponctuer la voix et la danse pour mettre en avant des liens imaginaires entre elles. Les textures abstraites ouvrent sur un réel fortuit.


La danse

La danse ouvre au corps, à la corporéité, non par interprétation du personnage du texte, mais par mise en relation avec lui. Le geste, la présence, l’absence, la disparition, sont autant d’éléments qui viendront lui apporter parfois un miroir, parfois un compagnon, parfois une solitude. Jouant toujours sur l’équivoque d’un reflet, la danse incarne la présence de l’autre, celui qui manque autant que celui que nous sommes.


La voix

La programmation et son exécution en direct devant un auditoire permettent d’accéder avec compréhension à un traitement inédit des mots du texte poétique. La voix enregistrée provoque une distanciation qui désincarne l’auteur en tant que récitant mais qui gagne en écoute pour l’auditeur par sa spatialisation provoquée par la diffusion et surtout l’agencement cohérent, intelligible des mots qui sont alors entendus, avec de nouveaux sens, des sensations surprenantes. La programmation en quadriphonie ouvre de nombreuses portes sonores, poétiques sur la manière avec laquelle faire entendre le texte.


Qu’est-ce que c’est ?

Le fils du muet n’a pas la parole est d’abord un travail d’écriture poétique à la feuille blanche, qui, au-delà de la rencontre intime avec le lecteur, mêle dans sa forme scénique, compositions en temps réel de la voix de l’auteur enregistrée, de la musique électrique amplifiée et de la danse. Son écriture originelle est donc pensée en tant que lecture au livre, et que musicalité/oralité/corporisation possible. Le mot émerge et va convaincre l’écriture d’être donnée à entendre et de s’entendre avec.


De quoi ça parle ? Cette poésie parle de la marge, de ce qui est en lisière, de ce qui peut être vu depuis une cachette du point de vue d’un être indéfini, secret, par force, par survie Son refuge est une forêt dans laquelle il enfouit sa vie, ses désirs, ses rêves Dans laquelle il s’enfuit De laquelle il ne peut s’enfuir vraiment Alors il longe la lisière, la frontière, ce qui le sépare des hommes Il y a toujours une séparation, un muret, un ruisseau, l’écorce, la mousse, une route Les sons, les allures, les rires, les gestes, les mots séparent Comment une histoire s’ajoute à l’autre, comme une chaîne d’événements étouffés Voir sans être vu, entendre sans être écouté, jouer sans y être appelé Un être peut naître d’une haine originelle et guérir par le refuge, l’attente, le silence, l’écoute L’être maudit a pour lui la confession intérieure et les actes de solitude Cette poésie exprime la peur, la crainte, le doute envers le monde, qu’il explose, qu’il hurle, qu’il atteigne par trop de folie, une violence sans secours, l’être démuni de naissance.

Pure Data


L’écriture La version originelle est constituée d’un seul filet de texte qui coule verticalement sur cinquante pages dans une colonne placée à gauche de la page. Sur chaque page en contre-chant de ce filet un carré fermé contient un autre texte venant contre-carrer celui de la colonne.

Une autre version comprend quatre colonnes de texte filant également sur cinquante page. La thématique de la seconde colonne est liée à la lumière, aux couleurs ; la troisième est liée aux sons, bruits, voix ; la quatrième aux mouvements, à la vitesse, la lenteur... c’est Les quatre colonnes.

D’autres versions existent dont des partitions pour voix, chacune prenant en charge une des colonnes et déclamant ce qui est indiqué par l’auteur.


Résumé du projet

Le Fils du Muet n’a pas la Parole n’est pas à proprement parler un texte. Il ne le deviendra que lorsqu’il sera mis en jeu en public. Plus de 4500 mots français ordonnés en colonnes sur le papier (50 pages) ont été lus et enregistrés dans le logiciel Pure Data (puredata.info) afin d’être diffusés manuellement et à la demande par un ordinateur à l’aide d’une interface simple et selon un agencement, un rythme, une spacialisation… joué en direct.


Michel Gendarme, tout en respectant une trame pré-établie, improvise sa poésie. On entend des mots, plus ou moins espacés, parfois superposés, toujours intelligibles, répartis dans l’espace, et qui offrent un sens au gré de leur diffusion. Des sons, une musique, un corps viennent créer un environnement.


Le fils du muet n’a pas la parole
Extrait d’une séance de travail au Logelloù - Trégor - juillet 2022
Le fils du muet n’a pas la parole
Extrait d’une séance de travail au Logelloù - Trégor - juillet 2022


Présentation du texte Le fils du muet n’a pas la parole

« Le fils du muet n’a pas la parole » est un travail d’écriture poétique à la feuille blanche, qui, au-delà de la rencontre intime avec le lecteur, mêle dans sa forme publique voix de l’auteur enregistrée, programmation et création électroaccoustique. Son écriture est donc pensée en tant que lecture au livre, et que sonorité/oralité/visualisation possible. Le mot émerge et va convaincre l’écriture d’être donnée à entendre et de s’entendre avec.


Cette oeuvre majeure pour moi se caractérise par une étude accrue de l’écriture poétique à la feuille/écran, tant d’un point de vue de la lecture syntaxique que de la lecture plastique qui peut la contenir. Cette lecture plastique est définie/contrôlée par la disposition particulière des mots et la géographie des espaces écrits poétiques, les filets textuels défilant le long de quatre colonnes sur chaque feuillet se défiant de l’espace des cinquante pages et du geste d’inscrire les mots. La fusion des expériences de lecture (verticale, horizontale) crée l’espace poétique propre à l’événement vécu par le lecteur, lors de la découverte/lecture. Pour se faire j’ai besoin d’affronter une exploration des possibilités ouvertes par ces voies/voix poétiques en construisant plusieurs versions/variantes de cette oeuvre.


Ces caractéristiques sont d’autant plus centrales dans l’ouverture de ma poésie actuelle à la nécessité de la rencontre avec les éléments fondamentaux qui la font naître dans l’écriture (formels et non-formels, connus et inconnus), que les tendances sont à la manifestation scénique de la poésie. La poésie écrite comme valeur absolue et assurée parce qu’étant l’essence de l’événement peut alors provoquer les gestes publics de se faire entendre et voir. La démarche d’écriture amène tout naturellement la démarche de création au plateau.


Cette poésie parle de la marge, de ce qui est en lisière, de ce qui peut être vu depuis une cachette du point de vue d’un être indéfini, caché, par force, par survie Son refuge est une forêt dans laquelle il enfouit sa vie, ses désirs, ses rêves Dans laquelle il s’enfuit De laquelle il ne peut s’enfuir vraiment Alors il longe la lisière, la frontière, ce qui le sépare des hommes Il y a toujours une séparation, un muret, un ruisseau, l’écorce, la mousse, une route Les sons, les allures, les rires, les gestes, les mots séparent Comment une histoire s’ajoute à l’autre, comme une chaîne d’événements étouffés Voir sans être vu, entendre sans être écouté, jouer sans y être appelé Un être peut naître d’une haine originelle et guérir par le refuge, l’attente, le silence, l’écoute L’être maudit a pour lui la confession intérieure et les actes de solitude Cette poésie exprime la peur, la crainte, le doute envers le monde, qu’il explose, qu’il hurle, qu’il atteigne par trop de folie, une violence sans secours, l’être démuni de naissance.

Extrait du texte

À propos du projet de création scénique

Assembler dans un même espace, dont les normes sont définies par les impératifs de la rencontre, plusieurs potentialités créatrices, afin de proposer en un temps relativement défini, au spectateur-auditeur, des multiples possibilités d’imprégnation poétique.


Agencer dans ce temps et cet espace les inter-relations créées entre la voix-texte, la musique, le son, par une recherche liée au conflit permanent entre cohérence et incohérence. Cette dualité provoque la naissance, la mort, l’enfouissement, le jaillissement poétiques. Cette intention se balise sur des mises en accord relatives des partenaires qui peuvent être épuisées ou naître au cours de l’expérience.


Travailler à l’instant avec les formes écloses des mots, de la voix, de la musique, des sons, de la lumière pour donner au spectateur-auditeur une présence en volume espace-temps. Qu’il garde l’illusion d’un hologramme poétique s’imprégnant encore dans son esprit après la séance. Une sorte de courbe mathématique aux dimensions fluctuantes dont les théorèmes sont inconnus. Une mathématique bleue de la mouvance sonore, visuelle et gestuelle.


Cette création est placée sous le signe de l’improvisation croisée corps écriture-voix musique-lumière.


De longs fils textuels ainsi que des micro-textes enregistrés (plusieurs milliers, de un à quatre mots) et programmés sont joués, diffusés et/ou projetés et déroulent une présence sonore en voix, tel un filet d’eau ininterrompu aux intensités variables, ponctué par des silences travaillés, des préparations ou créations en live d’ambiance sonores, comme autant de suggestions imaginables.


Cette trame est le terreau propice au développement (dans et hors l’espace défini par la présence du public et des systèmes d’écoute) des compositions sonores et de l’improvisation musicale vibrantes, denses, incarnées. Certaines sont enregistrées et programmées, des ajouts, retournements, doublages viennent ciseler ce continuum sonore.


Des blocs textuels déclarés ainsi que des blocs sonores-musicaux travaillés en improvisation viennent à des temps déterminés choquer, en live, cette élaboration physique et sonore, et ainsi bouleverser la suite du possible.


Lors de la représentation, les deux artistes sont chacun aux commandes de leurs modes artistiques respectifs. Ils travaillent en direct à mêler leurs intuitions et élaborations. Une expérience unique en temps réel et hors-temps, un travail poétique aigu, un espace d’expérience sur l’unité et la diversité organiques.


Genèse de l’écriture et projet transmédia

J’ai débuté l’écriture de cet ensemble poétique il y a quelques années. Progressivement la forme adoptée m’a imposé l’exploration de variantes et de compléments au texte original. Plusieurs parutions dans des revues, papier ou en ligne, Ouste, Verso, Décharge, Terre à Ciel, Recours au poème, dans des émissions radiophoniques comme Les arpenteurs poétiques (radio Pays d’Hérault), plusieurs présentations scéniques publiques d’extraits - aux formes différentes, solos, duos, choeurs - dans le cadre des Poétiques Hivernales (Dordogne), du Festival Voix Vives de Sète 2018 m’ont encouragé à continuer l’exploration des possibilités plurielles de cette oeuvre.

Pure Data

La programmation

Lorsque Michel Gendarme rencontre Maurice Moncozet, musicien, chanteur et compositeur, il lui expose son souhait de pouvoir manipuler en live directement des enregistrements du texte avec sa voix. Maurice lui propose de mettre au point une première programmation à partir du logiciel libre Pure Data. C’est ainsi que débute leur collaboration, qui se poursuit, Maurice travaille sans relâche à des adaptations ainsi qu’à de nouvelles versions de la programmation initiale, répondant ainsi aux recherches de nouvelles fonctionnalités. Les premiers enregistrements du texte avec la voix de l’auteur (plusieurs dizaines de pages) permettent d’engranger plusieurs milliers de fichiers sons, chacun contenant quelques mots. Ils correspondraient, si l’on rentrait le texte (dans la version Les quatre colonnes) dans un tableau, aux cellules de celui-ci. La programmation permet de sélectionner et de choisir rapidement la page du texte et le fichier son à faire entendre, permettant ainsi de manipuler rapidement les pages, les colonnes, les lignes. On peut donc jouer sur la succession des cellules, donc des mots, les agencer comme on le désire, ainsi que sur la vitesse de lecture, et les effets de panoramiques etc.


Les premiers enregistrements de ma voix du texte (plusieurs dizaines de pages) permettent d’engranger plusieurs milliers de fichiers sons, chacun contenant quelques mots. Ils correspondraient, si l’on rentrait le texte (dans sa version à quatre colonnes) dans un tableau, aux cellules de celui-ci. La programmation me permet de sélectionner et de choisir rapidement la page du texte et le fichier son que je veux faire entendre, me permettant ainsi de manipuler rapidement les pages, les colonnes, les lignes. Je peux donc jouer sur la succession des cellules, donc des mots, les agencer comme je le désire, ainsi que sur la vitesse de lecture, et les effets de panoramiques, réverbération, etc. Je peux jouer avec la lecture en lignes, en colonnes. Je peux mixer plusieurs sessions en les superposant.


Cette programmation et son exécution en direct devant un auditoire permettent d’accéder avec compréhension à un traitement des mots du texte poétique qui à ma connaissance est inédit. Ma voix enregistrée provoque une distanciation qui me désincarne en tant que récitant mais qui gagne en écoute pour l’auditeur par sa spatialisation provoquée par la diffusion, les effets induits et surtout l’agencement cohérent, intelligible des mots qui sont alors entendus, avec de nouveaux sens, des sensations surprenantes. La programmation en quadriphonie ouvre de nombreuses portes sonores, poétiques sur la manière dont je désire faire entendre mon texte.

Pure Data

Michel Gendarme est écrivain, poète et auteur dramatique, né en 1957 à Provins (77). Avec les mots il explore le sensible, l’invisible, l’innommable, jouant du réel et de l’imaginé dans une continuité poétique intimiste et sociale. Il aime transmettre sa passion par la conception et l’animation d’ateliers d’écriture. Lecteur de ses textes, le partage avec d’autres artistes, musiciens, chanteurs, plasticiens, peintres, danseurs enrichit toujours plus ses champs d’exploration écrite à la lumière de la confrontation scénique et de celle du public.


Poète Ed. Les cahiers de l’égaré, Gros Textes, Le Non-Verbal


Romancier Luce Lucie Lucia, Le lycée sauvage, Ed. Le Non Verbal


Auteur dramatique

Co-lauréat 2020 du prix d’écriture théâtrale Le Jardin d’Arlequin de Guérande pour ma pièce Origami Blues et lauréat 2016 pour D’urine et de fer (les fuyants). Origami Blues fait partie des textes remarqués par les Journées de Lyon des Auteurs de Théâtre 2018. Plusieurs de mes pièces ont été créées, diffusées et publiées : Le voyage d’Amadou (les survivants) (label Jeunes Textes en Liberté), Le rallye papa Noël (aide fondation Beaumarchais), Les tribulations d’Odile (fonds SACD), Les premiers bijoux, Un jour la paix, un jour la guerre, Neuf mois pour moi(s). Je travaille depuis plusieurs années avec la Cie Acte Sept (Bamako). Certaines pièces sont jouées au Mali, en Côte d’Ivoire, en Tchéquie. Mes dramatiques radiophoniques ont été réalisées par l’émission Nuit Noire sur France Inter.


Dossier de présentation du projet
Dossier de présentation du projet
FDM - CV des artistes
FDM - CV des artistes